Victor Rogister, 1874-1955

Archives d’architecture

Avec la collaboration du GAR – Archives d’architecture (ULiège)

Vernissage le dimanche 15 mai de 11h à 13h et de 15h à 18h

Exposition du 15 mai au 12 juin 2022 

Victor Rogister, maison de la rue Lairesse n°37, 1902

Victor Rogister est l’une des principales personnalités de la première génération des architectes de la modernité à Liège. Né à Verviers en 1874, il baigne dès son enfance dans un milieu tourné vers les arts. Son père, relieur et imprimeur, et sa sœur, peintre, contribue à développer chez le jeune homme sa passion naissante pour les beaux-arts. Inscrit à l’Académie des Beaux-Arts de Liège dès 1893 – une année qui voit la construction des hôtels Tassel (arch. Victor Horta) et Hankar (arch. Paul Hankar) – Rogister découvre d’abord les styles historiques qui constituent le socle de l’apprentissage académique mais développe également une maîtrise du dessin qui caractérise l’ensemble de son œuvre. Au terme de sa formation, il poursuit son apprentissage chez Paul Jaspar dont l’écriture mêlant tradition et modernité l’influencera profondément. Les premiers projets témoignent d’une même inclination à s’inscrire dans le contexte local tout en admettant quelques gestes discrets de modernité.

À partir de 1900, l’Art nouveau acquiert un nouveau statut passant des cénacles de l’avant-garde à une réception grandissante, en particulier dans le monde de la bourgeoisie. L’écriture de Rogister s’affirme et se veut plus démonstrative. Au contact de l’actualité architecturale internationale par le biais des revues artistiques, Rogister découvre les images de l’École de Glasgow et de la Sécession viennoise tout en adhérant ponctuellement aux convictions de la Gesamtkunstwerk dont Gustave Serrurier-Bovy est le principal représentant à Liège. L’habitation de la rue Lairesse, qu’il construit pour son propre compte en 1902, affirme avec force les singularités d’une écriture dans le paysage local. Le répertoire décoratif chargé de symboles s’inscrit dans le bois, le métal, le verre et la pierre et témoigne par ailleurs de l’exceptionnelle vivacité des artisans de l’époque. Quant au sgraffite, probablement dessiné par l’architecte, il affiche ouvertement des convictions presque mystiques : Ars mens est et materia (L’art est esprit et matière).

Rapidement, le travail de Rogister est reconnu et publié, ce qui lui permet de multiplier les projets de grande envergure mais également plus modestes comme des aménagements intérieurs d’habitations unifamiliales ou de commerces. Là aussi, l’architecte fait montre d’une maîtrise du dessin et d’un souci du détail affirmé. Plusieurs projets de compositions peintes montrant des figures féminines dans un paysage naturel témoignent en outre de l’influence du préraphaélisme sur les artistes liégeois de l’époque comme Auguste Donnay ou Émile Berchmans.

Avec l’essoufflement de l’Art nouveau à la veille de la Première Guerre mondiale, Rogister se soumet à l’air du temps et aux demandes de ses maîtres d’ouvrage usant tour à tour des répertoires « Beaux-arts» ou Art déco. La cinquantaine bien accomplie, l’architecte se tourne ensuite vers l’enseignement et devient professeur de composition architecturale à l’Académie des Beaux-Arts de Liège. Sa pratique pédagogique n’est toutefois synonyme de la fin de ses activités de créateurs et, au côté de son fils Victor Louis Rogister, il participe à plusieurs projets dont la conception des ponts de Flandre et de la place Sainctelette à Bruxelles (1929-1936).

S’articulant autour de documents inédits provenant de collections privées, l’exposition est le point de départ d’un parcours-découverte de l’œuvre d’une des figures les plus emblématiques de l’Art nouveau à Liège.

Sébastien Charlier, 2022