Ilse Garnier, Francis Edeline, l’espace du mot

03.10 – 31.10
Vernissage le dimanche 3 octobre de 11h à 13h et de 15h à 18h
La galerie est ouverte du jeudi au samedi de 15h à 18h
Les dimanche 17 et 31 octobre de 15h à 18h

Ilse Garnier Göttel

Ilse Garnier est née le 26 juin 1927 à Kaiserslautern en Rhénanie-Palatinat en Allemagne et décédée le 17 février 2020 à Amiens, dans la Somme en France. Elle obtient en 1950 un visa pour une année à la Sorbonne à Paris où elle rencontre Pierre Garnier, qui l’introduit dans le milieu littéraire parisien et qu’elle épousera. Elle deviendra dès 1955 et jusqu’à sa retraite bibliothécaire/documentaliste au Lycée d’état mixte d’Amiens.

Ses premiers essais de poésies sonore et visuelle datent du début des années 1960. Elle collabore à la revue Les Lettres. Poésie nouvelle. Revue du spatialisme, que dirige Pierre Garnier depuis la fin de l’année 1962, et qui met en réseau les courants de la poésie expérimentale internationale. Elle est cosignataire avec Pierre Garnier de Poèmes mécaniques et Poèmes mécaniques II (1965), Prototypes. Textes pour une architecture (1965), L’érotisme spatialiste (1966), Othon III – Jeanne d’Arc. Structures historiques (1967) et Esquisses palatines qui sera la dernière publication en commun (1971).

En 1973-74 Ilse Garnier affirme son propre chemin avec Rythmes et silence qui paraîtra en 1980. C’est également en 1973 qu’elle participe à la 1ère exposition de poésie visuelle féminine organisée par Mirella Bentivoglio en Italie. Participera aux expositions suivantes, dont Materializzazione del languaggio organisée dans le cadre de la Biennale de Venise 1978.

C’est en 1979 que paraîtra Blason du corps féminin, premier recueil de poésie spatiale sous son seul nom. Fensterbilder. Un livre d’heures paraîtra en 1983. Avec ce portfolio, elle sort du format A4 pour de grandes feuilles de papier canson mi-teinte. Elle utilise la craie grasse blanche qui attire la lumière, des règles droite et flexible, des lettres à coller. À la recherche d’une syntaxe des signes. Les textes sont conçus à partir de et en langue allemande, qui possède pour elle un caractère méditatif. Mais elle apprécie aussi particulièrement le système vocalique de la langue française.

Aux séries succèdent des cycles de textes incluant le temps. Des moments narratifs apparaissent. Se préoccupe d’impliquer le lecteur/spectateur dans la création.

« … Il faut abandonner tout point fixe pour vraiment sentir l’espace… ». Cette phrase de Malevitch qu’elle découvre au milieu des années 80 va désormais l’accompagner.

Ilse Garnier a continuellement l’envie d’expérimenter en choisissant soigneusement ses papiers et en utilisant toutes sortes de formats : en hauteur, en largeur, carrés, petits, grands. Elle expérimentera aussi le leporello, l’album-photo, le livre-cinéma, la carte postale. Réalise livres d’artiste et portfolios. Dessine sur le sol à l’aide de craies de couleur des œuvres éphémères qui s’effacent sous les pas des visiteurs (Marelles de la terre), projette des diapositives sous une tente (Voyage cosmique), conçoit un jeu de cubes en trois langues à découper et à coller, aime à capter le son visuellement (Ermenonville, Stimmen für Marguerite Duras…), écrit le scénario d’un poème cinématographie (De la terre vers l’univers), s’empare de la couleur (Légendes africaines), fait des collages, rassemble poésies visuelle et sonore (projet d’un Klangraum). Aime laisser aux commissaires d’exposition le choix d’agrandir ses poèmes, de les suspendre, de les mettre sur transparent…

Participe aux très nombreuses expositions qui se sont multipliées depuis le début des années 80 en particulier en Europe. Donne des conférences. Participe régulièrement aux colloques de Bielefeld, aux rencontres poétiques organisées en France et en Belgique (invitée notamment par Francis Édeline aux Biennales de poésie de Liège), et se rend à partir de 1990 aux « Symposion » de Gmunden.

En 2002, le Kunstverein de Bielefeld organise une rétrospective de son travail poétique.

En 2007, pour son 80ème anniversaire, et dans le cadre des Festwochen Gmunden, Josef Linschinger organise un Hommage à Ilse Garnier au Thomas-Bernhard-Archiv auquel participent 19 poètes dont des amis de longue date, Eugen Gomringer, Heinz Gappmayr, Franz Mon, S.J. Schmidt, Klaus Peter Dencker.

Francis Édeline

Francis Édeline est né à Bouillon en 1930. Il est biochimiste de formation et a été directeur du Centre belge d’étude et documentation de l’eau (Cebedeau). Il est aussi chercheur, sémioticien et musicien amateur. C’est un des membres fondateurs du Groupe liégeois µ.

N’appréciant pas les longs curriculum et sa devise étant escargot jamais ne trébuche, voici comment Francis Edeline se présente :

Ancien des Glénans.

Auditeur apparent du Collège de pataphysique.

Adversaire implacable des chats.

Antimozartien et antibalzacien.

Disciple d’Eudoxe (de Cnide).

Aime l’eau, le vent et le froid.

Malgré quelques efforts n’a pu trouver le sens des mots suivants : symbole, dieu, beauté.

Animal préféré : la loutre.

Fleur préférée : le coquelicot.

De formation scientifique, Francis Édeline découvre la poésie traditionnelle durant l’adolescence. C’est dans les années 60 à l’occasion de la chronique qu’il rédigeait dans le Journal des poètes qu’il fait la connaissance de Pierre et Ilse Garnier dont l’œuvre et les publications éveillèrent son intérêt pour les nombreux mouvements de poésies visuelles et concrètes qui se développaient à l’époque, tant en France et en Allemagne qu’en Italie, au Royaume-Unis et au Brésil. C’est ainsi qu’il consacra en 1969 un numéro complet du Journal des poètes à la poésie visuelle. Ses nombreuses recherches sur le sujet l’amenèrent à rencontrer les principaux protagonistes du mouvement parmi lesquels Henri Chopin, Thomas A. Clark, Ian Hamilton Finlay, John Furnival, Ilse Garnier, Pierre Garnier, Dom Sylvester Houédard, Ernst Jandl, Arrigo Lora-Totino, Tibor Papp, Timm Ulrichs, Jonathan Williams.

Il organisa de nombreuses manifestations et expositions et donna des conférences autour de la poésie visuelle et du livre d’artiste. Le travail artistique qu’il mène en toute discrétion et dont il réfute toute intention commerciale s’inscrit dans le sillage du mouvement de la poésie concrète et se caractérise par des objets et livres qu’il développe en jouant sur la matérialité des lettres et des mots et à partir de nombreuses associations historiques, symboliques et spatiales qu’il rassemble pour une partie aux auto-éditions de l’Esplumoir. En tant qu’adversaire implacable des chats, il aime l’évocation de cette cage où l’oiseau chanteur est enfermé au moment de la mue.

Il est l’inventeur des pocket poems et d’une forme de poème qu’il intitule poèmoebius qui se développe sans fin sur un anneau de Moebius. Il est également à l’origine d’une analyse d’un aspect particulier de la poésie visuelle qu’il a appelé les embrayeurs cosmiques.

Daniel Dutrieux, 2021